Le pont de Québec est plus qu’une simple structure d’acier reliant les deux rives du Saint-Laurent à la hauteur des villes de Lévis et Québec, plus que deux rails de chemin de fer, plus que trois voies de circulation routière. Avec ses 549 mètres de travée libre entre ses deux piliers, il est perçu comme un véritable symbole. Le symbole du génie civil canadien. Il a marqué une époque, en soulignant l’audace et la compétence de ses concepteurs, la détermination et la ténacité de ses bâtisseurs. Il est reconnu partout dans le monde comme un ouvrage unique, issu de la même famille que la tour Eiffel de Paris et la statue de la Liberté de New York. Le premier de ces deux monuments présente une armature d’acier à nu; le deuxième, une structure de même type, mais habillée. Deux modèles!
« Merveille du monde » à son époque, le pont a énormément fait parler de lui. Encore de nos jours, on s’y réfère constamment dans le monde de l’ingénierie. C’est l’exemple le plus parfait de structure cantilever (à porte à faux). Cette structure est la plus longue en son genre. Une longueur record qui ne sera d’ailleurs jamais égalé puisque ce type de support structurel n’est plus utilisé. Le pont de Québec restera toujours le pont cantilever avec une travée libre entre ses deux piliers la plus longue au monde.
Reconnu chef d’œuvre lors de sa mise en service, il a acquis par la suite deux titres de noblesse particulièrement prestigieux. D’abord, pour célébrer le centenaire du génie canadien, le 23 mai 1987, la Société de génie civil du Canada et l’American Society of Civil Engineers le décrètent tous les deux « monument historique international du génie civil ». Cette remarquable distinction n’avait été attribuée qu’à quatre ouvrages de cette discipline sur la planète à cette époque. Même la tour Eiffel ne figure pas dans cette courte liste. Cet honneur souligne aussi l’immense admiration que portent les ingénieurs du monde au pont de Québec, joyau du patrimoine mondial.
Puis, quelques années plus tard, le 24 janvier 1996, pour réaffirmer que « cet imposant ouvrage symbolise mondialement l‘excellence du génie canadien »*, ainsi que pour déclarer que ce pont est le plus imposant de toute l’histoire du génie au Canada, le ministre fédéral du Patrimoine, Michel Dupuy en fait un « lieu historique national ».
Il est à noter que, malgré son appellation de « grande œuvre de la Confédération », malheureusement, peu d’anniversaires de ce chef d’œuvre d’ingénierie ont été véritablement soulignés au fil des années. En 1987, un 70e bien modeste – en référence à la fixation du dernier boulon en 1917, et non à son inauguration officielle de 1919 – a été organisé par l’Univers du rail. Un hommage a aussi été rendu aux victimes des deux catastrophes au Cimetière de Saint-Romuald et une courte cérémonie a suivi au parc du Carrefour, à l’entrée sud du pont, où l’on a libéré 70 ballons multicolores. Il faut se rappeler qu’en 1907, la partie sud alors en construction s’était effondrée en provoquant 76 décès, puis en 1916, la travée centrale s’était engouffrée dans le fleuve lors de son installation pour en faire 13.89 morts en moins de neuf ans.
Comme il est évoqué précédemment, deux grands centenaires approchent : le centenaire de son ouverture à la circulation ferroviaire en 2017, et celui de son inauguration officielle en 2019. Il est à souhaiter que ces anniversaires non seulement ne passeront pas aussi inaperçus, mais qu’ils célébreront un ouvrage revalorisé.
- Document de réflexion « Un lien capital »
Photos
Voyez les photos de Jean Hémond, photographe et peintre.
*Inscription sur une plaque de bronze installée sur les terrains de l’Aquarium de Québec.